Denis Martinez me montre une
photo qu’il a ramenée avec lui de Blida jusqu’à Tessala. Sur cette reproduction
de la classe mixte où il n’était pas présent ce jour là (il avait dix ans) il s’était
rajouté en haut, en médaillon. De ce temps d’il y a plus de 65 ans on se
demande que sont devenus ces enfants, qui est encore de ce monde…
Entre lignes d’oliviers
et blés verts un printemps inédit borde la montagne Tessala
L’envie de planer dans l’air des
champs…
Quand j’arrive
dans la rue principale bordée d’oliviers tranquilles du village
(moins de 10 000
habitants, je crois),
écolières
et écoliers vont déjeuner chez eux en famille…
et je retrouve Denis Martinez à la cantine de la nouvelle école primaire ….
… avec les étudiants et enseignants de l’école des
beaux arts de Sidi Bel Abbes
(située à 16 kms de là)
qui sont venus réaliser des fresques murales sur des façades
que les villageois et la municipalité
ont mis à leur disposition.
…
Il y a
quelques mois, ayant retrouvé par hasard son livre de classe de lecture du
cours moyen « des Ecoles Nord-Africaines
d’Européens et d’indigènes », Denis Martinez m’avait raconté les
souvenirs indélébiles de cette lointaine époque (il vivait alors dans la région
agricole de Tessala, où son père était commis de ferme) ; une époque qui fait
partie d’un autre monde…
Son livre de classe…
La cour ainsi que le préau de la classe
unique mixte de Tessala d’il y a soixante ans, aujourd’hui déserte et abandonnée ;
une bâtisse que la municipalité pense me dit-il (peiné) abattre pour construire
une salle des fêtes afin de générer des ressources financières pour la commune…
Dans cette seule classe de l’école, m’informe-t-il,
l’instituteur enseignait en même temps aux élèves des cours CE1, CE2, CM1 et
CM2 qui se répartissaient en quatre rangées, la première (CE1) au fond de la
classe, la dernière (CM2) prés de la porte d’entrée… A peu prés comme dans
toutes les écoles communales de campagne et même dans les écoles savoyardes de
l’époque…
Et Denis d’opiner : « l’instit faisait marcher quatre niveaux,
chaque rangée de la classe ayant son occupation et son programme. D’une année à l’autre on changeait de rangée,
pas de classe »… « Les
instits eux qui étaient mutés à Tessala à l’époque l’étaient par mesure
disciplinaire. Ce qui fait qu’au bout de quelques mois l’instit changeait… »
« Une fois dans l’année quand même
les élèves venaient avec un couffin préparé par les parents à offrir à l’instit
avec soit des œufs, de la galette, ou un
morceau de gigot… »
Devant les escaliers menant à la seule classe de l’école
de Tessala en 1951-52
Sur le mur extérieur de l’école abandonnée on peint
aussi….
Sur le trottoir d’en face, Denis Martinez est pensif. Les souvenirs, d’autres
souvenirs d’enfance fusent… Il me confie que là, juste en face de l’école, se
trouvait une épicerie-bar tenue par un membre de la famille Seguy. Un des
frères Seguy, raconte-t-il « avait
un tic : il ne pouvait pas dire un mot ou faire quelque chose sans que sa tête
d’un coup échappe spasmodiquement sur le coté… A chaque moment, toute la
journée, toute l’année le même tic… On expliquait qu’un jour étant allé à la
chasse, il avait suivi avec son fusil un lapin jusqu’à son refuge prés d’un
marabout. Il tira ; le recul du
fusil lui donna un coup violent dans la mâchoire… C’était sa punition pour
toujours dit-on… »
A coté de l’épicerie-bar il y avait le maréchal-ferrant spécialiste des
roues en bois cerclées de fer. Il y avait également le moulin à grain du
village et, dernier et non le moindre :
le café maure avec la musique raï de l’époque où, de temps à autre, éclataient de véritables séances d’affrontement des paysans au « matrag » , à la canne !
Tout cela à la limite du village, à une cinquantaine de pas de l’église, transformée en mosquée à l’indépendance puis délaissée, pour une mosquée nouvellement construite....
Tout cela à la limite du village, à une cinquantaine de pas de l’église, transformée en mosquée à l’indépendance puis délaissée, pour une mosquée nouvellement construite....
Denis Martinez a un bon rapport aux enfants ; où qu’il passe dans
le village c’est un échange de questionnements spontanés et de rires… Il les
subjugue par son parler blidéen et nombre de ses interjections populaires...On
a presque l’impression qu’il est un de leurs maitres d’école (décontracté) dans
le village ; leur prof de dessin…
Finalement la leçon (si on peut parler de « leçon ») autour de la
question de l’école et de l’enfance, Denis Martinez va la donner à sa
manière en duo avec Abdelkader Belkhorissat, Directeur de l’Ecole des beaux
arts de Sidi Bel Abbès et proche parent de villageois de Tessala. En peignant eux
aussi au final un papillon à quatre mains sur le mur d'entrée de la nouvelle et grande école
communale. "Un papillon signe de printemps et de bienvenue"...
(le crédit de cette photo : école des beaux arts
de SBA)
Abderrahmane Djelfaoui
tres beaux article de témoignage du printemps a tessala ...une très belle plume ...je souhaitais dans tn papier d’ajouté karim sergoua et guerziz amaarle vidéaste de l'action et meme d'ajouté les noms des etudiants participants si c possible.....bravo est merci Abderrahmane
RépondreSupprimerMerci pour ce petit voyage par procuration, que tu nous fais faire Abderrahmane, vivement le prochain carnet de voyage, j'ai trouvé le portrait que tu as dressé de Martinez vraiment attachant!
RépondreSupprimerEcharef papa :-)
RépondreSupprimerCombattant du beau, du bon et du bien !!!
Fidèle à la mémoire, au patrimoine et à la culture !!!
Tu es un travailleur de lumière et je suis si fière de toi :-)
Ta fille qui t'aime,
Yasmine
Bonjour Abderrahmane,
RépondreSupprimerJe compte travailler sur ce blog, aujourd'hui, avec un groupe d'étudiants en Programmation et multimédia nommé G3-All. Iles te feront part de leurs réactions, ici même afin de te laisser le soin d'y répondre. Merci et à très bientôt.
Abderahmane merci pour ce partage et au diable la nostalgie dt on a besoin qq fois pour poursuivre son chemin.
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