Au matin de ce 5 juillet je me
suis éveillé en me demandant : quelle image choisir à partager sur mon
mur facebook pour cette date anniversaire?
Je le savais depuis la veille,
en fait, puisque en feuilletant des photos de mes voyages dans le pays et vues
de ses paysages dans la nuit, une image d’altitude avait saisi mon esprit ;
mieux : elle avait saisi en moi quelque chose de profond et d’aérien à la
fois comme les cigognes savent d’instinct faire vol d’un continent à l’autre…
Le lieu et la date de cette
vue n’ont apparemment aucun lien direct avec la célébration de l’évènement.
Bon Jour
A Toutes et à Tous
Vendredir de fierté
Vendredir une pensée à celles et ceux qui ont humblement accompli leur part du destin
Vendredir pour le présent de nos enfants
Vendredir la terre et ses coquelicots
Vendredir ses arbres méditerranéens
Vendredir de fierté
Vendredir une pensée à celles et ceux qui ont humblement accompli leur part du destin
Vendredir pour le présent de nos enfants
Vendredir la terre et ses coquelicots
Vendredir ses arbres méditerranéens
Et pourtant !
Pour « ce » juillet, il
y bien sur encore en moi des centaines de bribes de souvenirs d’avant cette
date, durant la période de la guerre de libération nationale quand enfant
j’allais entre quatre et onze ans…
Il faudra bien, me dis-je, que je mette un jour bout à bout (délicatement) ces bribes vives, chantantes ou silencieuses de mystère, d’interrogations…
Il faudra bien, me dis-je, que je mette un jour bout à bout (délicatement) ces bribes vives, chantantes ou silencieuses de mystère, d’interrogations…
Donc cette image du jour (prise
en juin 18, sur le chemin du retour d’Azzefoun par la montagne d’Aghribs à plus
de 1000 mètres d’altitude ; région d’où sont issus le musicien
Iguerbouchène ou la famille du héros Didouche Mourad, né lui-même à Alger
Belcourt …
D’ailleurs, à 10 kms à vol
d’oiseau au-delà ces monts, c’est la commune de Fréha dans la plaine d’où
étaient issus les grands parents de ma mère et qui s’expatrièrent tous à la fin
du 19 eme siècle vers le Titeri ; -un des frères de mon arrière grand père, m'a-t-on dit, avait été envoyé pour le restant de son existence à plus de 17 000 kms
dans le Pacifique sud, dans le bagne de Nouvelle Calédonie…
La seule photo de mon grand père
maternel, Mohamed, né en 1901 à Médéa, qui de très actif et humblement patriote
toute sa vie n’eut jamais l’occasion ni la joie de revoir ne serait-ce qu’une
fois la terre de ses aïeux… Mon autre grand père paternel, Aïssa, me répétait avec
la sérénité de celui qui a dompté son amertume: la terre d’Allah est vaste…
Je laisse là Mohamed et Aïssa et
je plonge directement dans le 5 juillet
1962 à Alger.
C’est une vue prise sur le vif à
la basse Casbah, par le regretté Mohamed Kouaci qui de 1958 à l’indépendance
fut le photographe de l’exode des populations paysannes algériennes fuyant
bombardements et misères pour se réfugier en Tunisie ; il photographia
également les dirigeants du Gouvernement Provisoire de la République Algérienne
(GPRA) installées à Tunis, comme encore Frantz Fanon ou les rédacteurs du
Journal El Moudjahed , etc…
5 juillet 2019, Rue Hassiba Ben Bouali
Avec le stationnement depuis deux
vendredis de lignées de cars de police le long des trottoirs, la spontanéité du contexte n’est plus la
même, encore bien moins que celle que nous communique une autre photographie de
Mohamed Kouaci prise le 5 juillet 1962, à la basse Casbah d’Alger, à l’angle de
la rue du Lézard…
Aujourd’hui c’est une
manifestation de modernité pacifique et de bonheur partagée, certes, mais avec
l’appréhension de ce qu’est la (difficile) nécessité d’un nouveau vivre-ensemble,
à peine entrevu, à peine abordé au travers d’une inouïe course d’obstacles…
Fin du boulevard de l’immortelle
jeune héroïne Hassiba, les fourgons de la police sont garés en travers de la
chaussée rendant impossible la poursuite de la marche populaire, comme les
autres vendredis depuis le 22 février, à travers la trémie vers le colonel
Amirouche puis la rampe Tafouraf …
Alors ?
Changement d’itinéraire pour les
dizaines de milliers de marcheurs.
Passer par les petites rues et
les escaliers transversaux montant vers la Rue Didouche et la place Maurice
Audin… Et c’est sur ce parcours tortueux qu’on peut voir leur misère,
au moment où la terre de ce pays produits ses belles richesses…
Mais aussi ceci
C’est dire qu’un barrage 300
mètres plus bas n’a pu empêcher au final le rassemblement d’une foule
millionnaire et coloriée !
Une vue qui a fait mille fois le tour des
réseaux sociaux, signée Youcef Ketfi auteur de plusieurs beaux livres sur
l’Algérie publiés tant au Canada qu’en Suisse…
Ce même lieu, au ras de la
chaussée où la foule ovationnait Benyoucef Mellouk pour son courageux combat solitaire
mené depuis un quart de siècle contre « les magistrats-faussaires »
(procureurs et procureurs généraux) qui se sont indument accaparés du titre de Moudjahed
et jamais inquiétés jusqu’ au jour d’aujourd’hui…
Photographie
diffusée le 5 juillet sur internet par
l’éditeur
Boussad Ouadi
C’est sur ce même croisement de
boulevards centraux, cinq semaines auparavant, lors de la marche du vendredi 31
mai, dernier du ramadhan, que je rencontrais par hasard madame veuve Kouaci,
contente mais qui me sermonna de ne pas l’avoir appelée pour discuter de l’état du projet commun d’un
ouvrage à la mémoire de feu Mohamed Kouaci (1922-1996) dont on a vu
quelques photos plus haut. Un ouvrage projeté pour vulgariser son œuvre auprès
des jeunes générations comme l’avait souhaité Kouaci lui-même, homme d’une
autre époque de terribles luttes et de résistance…
Avec
madame Safia Kouaci
15 heures 30, remontant
Didouche dans la liesse populaire :
Sous les 40 degrés torrides de
juillet, je captais ces autres images:
Comme celle aussi d’un carré de
marcheurs unis par une grande banderole exigeant la libération du commandant
Lakhdar Bouregaa, officier de l’historique wilaya IV, emprisonné fin juin pour
ses propos critiques contre l’armée et certaines personnalités de l’oligarchie
administrative.
Ce même boulevard où l’icône de
la révolution algérienne, Djamila Bouhired, est également photographiée au
centre de ce 5 juillet 2019 par Mohamed Cherchal
Image d’un groupe de jeunes dans le flux de la marche claquant des mains et chantant la gloire des héros de « la bataille d’Alger », Hassiba Ben Bouali et Ali la Pointe, tout comme celle du Colonel Amirouche…
Du colonel Chaabani, exécuté à
son trentième anniversaire le 4 septembre 1964 à Oran sur ordre de Ben Bella et
de son chef d’Etat major et ministre de la défense, etc, etc…
La fierté enfin de se faire photographier avec Larbi
Ben Mhidi, dirigeant de la Révolution algérienne (exécuté par l’officier
parachutiste de renseignement Paul Aussaresses, sous les ordres directs du
général Massu en 1957)…
…Et si nos tee-shirts et
cassettes sont mouillés de sueur, ils le sont aussi par la bonté d'une Madone à son balcon qui a su, contre la canicule et la fatigue, faire de la pluie pour toutes les passantes et passants
Puis une autre vague, partie de
la Grande poste en remontant d’abord tout Didouche Mourad, bifurque pour
descendre la rue Victor Hugo afin (« Légende des siècles ») de
rejoindre le boulevard Hassiba ben Bouali arborant un drapeau de plusieurs
dizaines de mètres confectionné de 48 exemplaires représentant les 48 wilayate
du pays…
Ce qu’exprime tout aussi bien à
sa manière Le Hic, (de son vrai nom
Hichem Baba Ahmed) dessinateur de presse, bédéiste et caricaturiste algérien,
né en 1969) dans le journal El Watan :
Ni cette magistrale manifestation
aux centaines de ramifications de rues, de places, d’escaliers, ni cette
magnifique journée d’été ne sont évidemment terminées ; mais il est tout même reposant de s’adosser
un moment à la mer, même si c’est une image…
Abderrahmane
Djelfaoui
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire