10 mai : vernissage de l’Exposition
« L’étranger » sous le
chapiteau du FIBDA, à l’esplanade de Riadh El Feth sur la colline-plateau dominant les quartiers
de Belcourt, du Hamma et l’ensemble de la baie d’Alger.
Avec
Dalila Nadjem, Commissaire du FIBDA
Là, bien après la cérémonie d’ouverture, presque vers la
fermeture même de l’exposition j’ai rencontré Jacques Ferrandez qui signait
encore ses ouvrages, particulièrement « L’Etranger », adapté du roman d’Albert Camus et édité chez
Gallimard Jeunesse en 2013 (« Année
Albert Camus »)…
Ce qu’il est d’ores et déjà intéressant de savoir c’est que cette bande
dessinée n’est pas la première à mettre en images l’œuvre de Camus. Le
dessinateur avait déjà adapté en 2009 le très intrigant « L’hôte » (la quatrième des six nouvelles
qui compose le recueil «L’exil et le
royaume») …
Quand je demande à Jacques Ferrandez le pourquoi d’une telle
proximité avec l’œuvre d’un des plus grands écrivains du 20è siècle, il me
répond avec la douceur de son sourire et une sérénité joyeuse dans le ton :
« C’est que je
suis né moi-même à Belcourt en 1955… Mes grands parents paternels possédaient
un magasin de chaussures, à l’enseigne ROIG, au 96 boulevard de Lyon. Camus habitait
au 93…juste en face. C’est donc vraiment une histoire de proximité »…
Jacques
devant l’image de l’ex Boulevard de Lyon
J’apprends alors en passant à Jacques Ferrandez que moi-même
suis né en 1950 «à proximité» :
rue Lafontaine, qui continue la descente d’El Aquiba et que mon père, Mansour, et mon grand père Aïssa sont enterrés à quelques
pas de là au cimetière de Sidi M’Hamed. Là même où fut enterré en 1950 un des
premiers écrivains de l’Algérie Moderne, Ali El Hammami, auteur du roman « Idriss »…
Jacques me demanda si je savais où se trouvaient dans le
quartier les ateliers des tonneliers évoqués par Camus. Sa question resta sans
réponse, puisque moi-même je me le demande aussi, la ville ayant au fil des décennies,
et cela bien avant nous, déjà engloutie
ses trolleys ainsi qu’une bonne partie des cercles de sa mémoire…
Pépé le Moko – L’étranger…
Devant l’image stylisée de très grand format des quais du
port d’Alger, il reste un moment le bras
tendu vers elle avant d’expliquer :
« Pour m’inspirer
dans mon travail d’images, je dois faire appel à beaucoup de documents d’époque.
Des documents écrits ou des photos pour savoir comment les gens se coiffaient,
quel style de vêtements ils mettaient, quelles chaussures, etc…
« Ici, pour bien
situer la ville il me fallait un plan du port d’Alger. Je me suis alors souvenu
du film « Pépé le Moko » avec Gabin,
film en noir et blanc où la plupart des séquences avaient été tournées en
studio, [ à Marseille, ai-je ajouté…]
mais où il y avait quelques plans réels de la ville. J’ai pris celle-là que j’ai
mise en couleurs où on voit deux marins en train de repeindre l’arrière du
navire «La ville d’Oran». Oran pour laquelle beaucoup de lecteurs en avaient
voulu à Camus de l’avoir décrite de façon négative dans « La peste »…
« Pépé le Moko
avait été tourné au milieu des années 30. L’étranger était paru juste quelques
années après. Ca correspondait, c’était la même époque d’avant la deuxième
guerre mondiale… »
La dédicace
A coté de « L’étranger »,
étaient exposés nombre d’autres ouvrages de Jacques Ferrandez, notamment « Dafatir
mina el jazair » (« carnets
d’Algérie ») traduit et édité par les éditions Dalimen dirigées par
Mme Dalila Nadjam.
Mais également des ouvrages du cycle Carnets d’Orient parus chez d’autres éditeurs : « La guerre fantôme », « La fille du Djebel Amour », « Rue de la bombe »…
Je choisis bien évidemment deux exemplaires de « L’étranger » et demandais à
Jacques Fernandez de les dédicacer, le premier pour Hamid Nacer-Khodja qui
tenait absolument à avoir cet ouvrage dans sa bibliothèque à Djelfa où il est
professeur d’université ; le second pour moi-même…
Et Jaques Fernandez de concevoir (de mémoire) puis dessiner
pour l’ami de l’ami cette dédicace dont j’imaginais déjà à quel point elle
allait être apprécié par le lointain destinataire…
Je me dis alors en moi-même : Voila que le dessinateur vient
de tracer le premier trait à ce qui pourrait être conçu et intitulé par lui,
pourquoi pas : « Les carnets de
route de Jean Sénac »…
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